"Mon enterrement ne sera pas télévisé. Quelle joie...!
Je suis sous assistance respiratoire mais je parviens encore à me réjouir. D'ailleurs, ma dernière satisfaction sera de ne jamais pouvoir lire leurs articles. Ils vont me traiter de nègre, de génie, de poète, de camé... et je m'en moque. Ceux qui m'aiment comme ceux qui me haïssent se partageront les colonnes. Il y en aura pour tout le monde, le papier se vendra toujours. D'ici, je pressens les annonces et les ralliements. Les fils cachés sortiront après le tour de chauffe. Je serai proclamé définitivement "Père du rap". Ils m'emmerdent tous avec ça. Je me fous du Hip Hop et de ses guignols. Le jour où ils ont pu signer des chèques avec des chiffres à quatre zéros ils avaient déjà perdu tout leur humour. La cupidité est trop expansive pour laisser la place à d'autres sentiments. Moi-même, j'ai viré beaucoup de sentiments. J'ai vieilli trop vite. Je n'ose même plus me croiser dans la glace. Jamais je n'aurais pensé que la vieillesse nettoyait autant par le vide. Je m'allège. Je perds mes envies, mes certitudes et mes kilos. Tout me semble superflu. A vingt ans j'aurais pu cogner un mec pour une insulte raciste. Jamais je ne renonçais. La fierté maintenait mes vertèbres en place. Avec ou sans musique je pensais changer le monde. Aujourd'hui, mes illusions sont retombées. Les familiers me saluent d'un signe de main. Ma tronche de toxico sidéen crée un périmètre de sécurité. Où sont passés les compagnons ? Brian Jackson me reproche encore la drogue. Il raconte aussi que je l'ai volé, qu'il n'a pas touché son dû. Ce mec vit dans un palace orienté plein sud et il ose encore la ramener devant les journalistes. Je n'ai plus d'adresses fixes. Je vais crever et je dois encore rembourser 20 000 dollars pour les obsèques de ma mère. J'ai honte pour ça. J'ai honte de ce que je suis devenu et je vous demande pardon. Regardez moi. Enfoncez vos rétines dans mon corps décharné. Oubliez moi. Je suis prêt à prier pour ne plus jamais être jugé. Faites comme si je n'avais pas existé...
Et si par bonheur, dans le futur, des gosses viennent m'arracher au néant, dites leur pourquoi j'ai choisi le péril intime, rappelez leur à quel point j'étais sincère.
Insistez aussi pour qu'ils mettent le son plus fort. De là haut, sait-on jamais, je pourrai avoir du plaisir à m'entendre renaître."
Je suis sous assistance respiratoire mais je parviens encore à me réjouir. D'ailleurs, ma dernière satisfaction sera de ne jamais pouvoir lire leurs articles. Ils vont me traiter de nègre, de génie, de poète, de camé... et je m'en moque. Ceux qui m'aiment comme ceux qui me haïssent se partageront les colonnes. Il y en aura pour tout le monde, le papier se vendra toujours. D'ici, je pressens les annonces et les ralliements. Les fils cachés sortiront après le tour de chauffe. Je serai proclamé définitivement "Père du rap". Ils m'emmerdent tous avec ça. Je me fous du Hip Hop et de ses guignols. Le jour où ils ont pu signer des chèques avec des chiffres à quatre zéros ils avaient déjà perdu tout leur humour. La cupidité est trop expansive pour laisser la place à d'autres sentiments. Moi-même, j'ai viré beaucoup de sentiments. J'ai vieilli trop vite. Je n'ose même plus me croiser dans la glace. Jamais je n'aurais pensé que la vieillesse nettoyait autant par le vide. Je m'allège. Je perds mes envies, mes certitudes et mes kilos. Tout me semble superflu. A vingt ans j'aurais pu cogner un mec pour une insulte raciste. Jamais je ne renonçais. La fierté maintenait mes vertèbres en place. Avec ou sans musique je pensais changer le monde. Aujourd'hui, mes illusions sont retombées. Les familiers me saluent d'un signe de main. Ma tronche de toxico sidéen crée un périmètre de sécurité. Où sont passés les compagnons ? Brian Jackson me reproche encore la drogue. Il raconte aussi que je l'ai volé, qu'il n'a pas touché son dû. Ce mec vit dans un palace orienté plein sud et il ose encore la ramener devant les journalistes. Je n'ai plus d'adresses fixes. Je vais crever et je dois encore rembourser 20 000 dollars pour les obsèques de ma mère. J'ai honte pour ça. J'ai honte de ce que je suis devenu et je vous demande pardon. Regardez moi. Enfoncez vos rétines dans mon corps décharné. Oubliez moi. Je suis prêt à prier pour ne plus jamais être jugé. Faites comme si je n'avais pas existé...
Et si par bonheur, dans le futur, des gosses viennent m'arracher au néant, dites leur pourquoi j'ai choisi le péril intime, rappelez leur à quel point j'étais sincère.
Insistez aussi pour qu'ils mettent le son plus fort. De là haut, sait-on jamais, je pourrai avoir du plaisir à m'entendre renaître."